Octobre 2000 : j’ai 19 ans, je suis étudiant à Aix-en-Provence et je vis sur le campus à la cité universitaire des Gazelles. J’adore ma nouvelle vie.
Je rencontre plein de personnes intéressantes et je me fais une super bande de potes. Il y a Théo, cet étudiant grec sur lequel j’ai flashé, mais visiblement l’attirance n’est pas réciproque. Samir, un fan de Whitney Houston avec qui je vais sortir brièvement (pas trop d’alchimie au lit et il ose dire que Whitney a vendu plus d’albums que MJ !).
Virginie aussi est là. Inscrite à la même fac en lettres modernes et logée à une cité U voisine de la mienne. Elle est devenue une de mes plus proches amies et elle l’est toujours aujourd’hui, vingt ans après.
La plus belle rencontre de ma nouvelle vie étudiante est sans doute celle avec Aurélie . Cultivée, drôle, pétillante, engagée. Aurélie va devenir ma confidente et ma sœur de cœur pendant plus de dix ans. On ne se parle plus aujourd’hui, mais je garderai toujours un souvenir tendre et précieux de nos années fac.
Tous les vendredis, je vais au New Cancan, à Marseille. Là-bas, je rencontre Feisal , 30 ans, marié avec des enfants. Je suis dingue de lui, même si je sais qu’on n’a aucun avenir ensemble, c’est sans doute ça qui rend la chose romanesque.
Tout pourrait aller pour le mieux, mais voilà, la vie en a décidé autrement. Maman a fait une rechute violente de son cancer. En quelques mois elle a perdu beaucoup de poids et tous ses cheveux.
J’essaie de la soutenir du mieux que je peux, mais c’est difficile car je ne vis plus avec elle. Je rentre tous les week-ends à Miramas et quand elle est hospitalisée, je vais la voir à Arles.
En novembre, je fais la connaissance d’Armand . Un beau blond de 35 ans. C’est le coup de foudre. Il me fascine par son charisme. Il est grand, sûr de lui et il vit dans une maison à Fos-sur-Mer.
Mais sexuellement, c’est compliqué. Il n’a pas trop de libido. Quand on essaie de faire l’amour, la capote le fait débander.
Et puis la nuit, il se tord de douleur. Je le vois prendre des médicaments. Il me dit qu’il a des problèmes intestinaux, mais « rien de grave ».
On passe le réveillon de Noël ensemble, on est un peu bourrés. J’ai envie qu’il me prenne sans capote. Il refuse. J’insiste. On fait l’amour et au moment de jouir, il se retire.
Le lendemain, je vais dans ma famille et soudainement je n’ai plus de nouvelles d’Armand.
Il ne répond plus à mes appels ni mes SMS. J’essaie pendant des jours de le contacter. Je laisse plein de messages. Un ami commun me dit qu’il ne veut plus me voir.
Je n’arrête pas de penser à lui et je me demande ce que j’ai pu faire pour qu’il me rejette aussi soudainement. On a passé qu’un mois ensemble, mais c’est une grosse claque. Je me sens tellement triste. J’apprends quelque temps plus tard par une amie de son ex qu’il est séropositif.
Ma première réaction est sérophobe. Je l’accuse de m’avoir caché son état de santé et je me dis qu’il m’a peut-être transmis le VIH. C’est de l’ignorance, bien sûr, et de la peur. Il a essayé de me préserver, c’est moi qui ai lourdement insisté pour qu’il me prenne sans capote. Et il s’est retiré avant de jouir.
Aurélie m’accompagne faire un dépistage. Elle est morte de trouille, moi assez indifférent. Le résultat est négatif, mais on me demande de le refaire dans trois mois.
Trois mois après, je suis toujours négatif. « Le sida, il ne passera pas par moi ».
Fred Colby 