Chapitre 49 : Blogueuse sida

L’été 2018 est assez magique. Je pars à Barcelone et Sitges avec Cédric. C’est là-bas qu’un jour sur la plage me vient l’idée de créer un blog. Twitter c’est bien, mais je ressens le besoin d’écrire des textes plus longs et plus personnels.

De retour à Paris, tout va très vite. Je connais un peu WordPress car je m’étais fait la main quelques mois avant en créant un blog sur la famille Jackson. Je décide de nommer mon blog Fred Colby. C’est un peu égocentrique, mais c’est le nom que j’ai choisi en 2016 pour faire mon coming out séropo sur Twitter. Je ne veux pas utiliser mon nom de famille. D’abord parce que je l’associe trop à mon père et à mon enfance à Miramas et aussi car je me dis qu’en cas de bad buzz, je ne veux pas exposer mon frère et mes neveux/nièce.

Colby est une référence tout à fait assumée à Alexis Colby, la flamboyante héroïne de Dynastieincarnée par la légendaire Joan Collins. C’est une femme libre, forte, indépendante et affranchie des conventions sociales. Je l’adore !

À peine rentré à Paris, je crée mon blog en quarante-huit heures et je publie mon premier article le 31 août 2018 intitulé « Je suis séropo et clean ». Tout va très vite. De nombreuses personnes partagent le billet sur Twitter et Facebook. Le même jour, Hornet France, un média LGBT +, écrit un article pour relayer mon blog. Quelques jours plus tard, le 14 septembre, Têtu publie mon portrait. C’est une grande fierté pour moi. Je me revois à 18 ans acheter mon premier Têtu à Miramas et le cacher dans mon sac car je n’avais pas encore fait mon coming out. Un mois plus tard, un autre média LGBT +, Komitid, me propose de tourner une petite vidéo sur la sérophobie qui va beaucoup tourner sur les réseaux sociaux.

À l’approche du 1er décembre, journée mondiale de lutte contre le VIH/sida, je suis sollicité par plusieurs journalistes. Mes propos sont recueillis dans Libé et Le Monde. Une équipe de France 2 vient à la maison pour filmer une séquence avec Cédric et moi pour le JT de 20 heures. En parallèle, le documentaire Vivre, réalisé par Dominique Thiery pour le CRIPS, est projeté dans un cinéma du 14e. Je fais partie des six portraits. Le soir de la projection, je suis à la fois très ému et très stressé de voir ma gueule sur un écran de cinéma. En plus il y a Cédric, sa maman et plusieurs amis proches. Je suis heureux du montage. Les images sont belles, tous les messages que je voulais faire passer ont été conservés et je trouve ça génial de savoir que ce documentaire sera diffusé dans des lycées.

À la fin de la projection, je rejoins le réalisateur et les autres témoins et je prononce quelques mots : « La lutte contre le VIH, c’est une communauté de destins, ce soir on est six personnes très différentes hétéro, gay, trans, Noir et on est tous liés par notre combat. »

Suite à trois mois de forte exposition, je suis un peu dépassé par les événements, beaucoup de gens m’écrivent en privé. J’essaie de répondre à tout le monde. Il y a des séronégatifs qui ont des questions sur le VIH, sur la PrEP. Il y a des séropos qui me remercient. Certains se sentent seuls avec le secret du VIH et ont besoin d’en parler. D’autres veulent me rencontrer. J’accepte au début, mais ça devient vite chronophage.

Qui dit forte exposition dit aussi trolls. Lorsque mon portrait est publié sur la page Facebook de Têtu, les trolls sérophobes se déchaînent. Cédric me demande de ne pas les lire, mais c’est plus fort que moi. Je lis des horreurs du genre « Ce mec est dangereux il banalise le sida » ou encore « Il avait qu’à mettre une capote, qu’il vienne pas se plaindre ». Têtu est obligé de supprimer le post de mon portait sur leur page Facebook et ils bloquent la fonction « commenter » sur leur page Web. Ça me fait de la peine, mais c’est peut être mieux ainsi.

Un jour, je me réveille et je découvre que dans la nuit quelqu’un a créé un compte twitter nommé « Zéro Fierté » qui s’en prend à moi en publiant ma photo et me traitant de « sidaïque ». Il tweete aussi mon vrai nom de famille et cherche à me nuire. Je le signale et je le bloque. Je me dis que c’est sûrement quelqu’un en grande détresse psychologique. Cédric me rappelle que je dois me préserver.

J’ai aussi du mal à gérer la quantité d’e-mails et messages privés. Là encore, Cédric me raisonne en me disant que je ne suis pas une association à moi tout seul et que je dois renvoyer les gens qui vont mal vers des structures qui sont faites pour les aider.

C’est là que me vient l’idée de créer un site portail avec toutes les infos de base sur le VIH et la PrEP et tous les liens vers les assos et structures spécialisées dans l’accompagnement des personnes vivant avec le VIH. Je décide d’appeler ce nouveau site « Parcours Positif ».


LIENS DE COMMANDE DE LA VERSION PAPIER

CHAPITRE PRÉCÉDENT

CHAPITRE SUIVANT

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s