Allez, tu vas kiffer, laisse-toi faire

Samedi 15 août 2009, Noisy-le-Grand. Je me sens plus seul que jamais.

Pour passer le temps, j’enchaîne les plans cul. Ce jour-là, je me connecte à Rézog, un site de rencontres.

Je discute avec plusieurs mecs dont un qui m’excite bien. Il me dit qu’il est avec son pote et qu’ils cherchent un plan à trois. Ils se disent bisexuels et en couple avec des filles donc bien sûr ils ne peuvent pas recevoir.

On se chauffe pendant une bonne heure, mais ils refusent de me donner leur tel. Je leur donne le mien en me disant que comme la plupart du temps c’est un mytho qui se branle derrière son écran et qu’ils ne vont jamais venir…

Mon téléphone sonne peu après avec un numéro masqué : « On part de Saint-Denis, rendez-vous en bas de chez toi dans une demi-heure ? »

J’hésite à annuler le plan et je commence à flipper. J’ai jamais fait venir deux mecs en même temps, qui plus est inconnus, chez moi, mais je me dis que je vais peut-être passer un super moment.

Finalement, l’appel de la bite est plus fort que celui de la raison et je réponds OK.

Une heure après, toujours pas de nouvelles. Je les traite de mythos sur le site, mais cinq minutes plus tard, nouvel appel masqué : « On est en bas de chez toi. »

Grosse panique, je peux plus annuler. Je suis à la fois très excité et très angoissé par cette situation.

Je descends les chercher. Effectivement ils sont là et encore plus beaux qu’en photo. Look « lascars de cité » tout droit sortis d’un porno gay.

Dans l’ascenseur qui mène à mon étage, je ressens un malaise. On ne se dit pas un mot et les deux mecs se regardent comme s’ils préparaient un mauvais coup. Ça sent pas vraiment le sexe…

Arrivés chez moi, le malaise est de plus en plus palpable. Je leur propose un verre de Coca. Ils boivent sans dire un mot et l’un d’eux me dit : « Bon, on passe aux choses sérieuses ? »

J’ai un mauvais pressentiment… Je prétexte un passage aux toilettes et là, les doigts tremblants, j’envoie un texto à Virginie : « Désolé de te mêler à ça, mais j’ai fait venir deux mecs chez moi pour un plan à trois et je le sens pas trop ce plan. Si t’as pas de nouvelles de moi dans trente minutes, appelle les flics, STP ! Désolé… »

Quand je sors des toilettes, ils m’attendent dans la chambre. Je commence à m’approcher d’eux pour qu’on se chauffe, mais l’un d’eux sort une ficelle. « Tu aimes bien te faire attacher ? ».

Je réponds : « Euh non, c’était pas prévu ça… »

Eux : « Allez, tu vas kiffer, laisse-toi faire… »

Moi : « Bon, j’ai compris votre manège, c’est du fric que vous voulez ? »

Eux : « Bah oui, t’as cru qu’on allait se déplacer pour rien ? »

L’un d’entre eux sort un couteau. Mon cœur bat à cent à l’heure. Je vois venir la fin de ma vie. Et surtout, je m’en veux d’avoir laissé mes pulsions sexuelles prendre le dessus sur mon instinct.

Je leur demande de pas me faire de mal et que je vais faire ce qu’ils demandent. Ils m’attachent les pieds et les mains et me demandent ma carte bancaire et mon code. Je suis tellement paralysé par la peur que je ne me souviens plus de mon code. Ça les énerve et je me reçois un coup de pied dans la cuisse.

Je finis par lui donner un code bidon en espérant me débarrasser d’eux. Mais ils sont malins. Un des deux part chercher un distributeur pendant que l’autre reste avec moi et il me prévient : « Si tu as menti, tu vas passer un sale quart d’heure. » Je suis pétrifié de peur.

Juste après, mon tel commence à sonner. Je dis au mec que c’est ma meilleure amie et que si je ne réponds pas, elle va appeler les flics car je l’ai prévenue par texto. Il ne me croit pas, puis vérifie dans mes textos et vois que je dis la vérité. Virginie n’arrête pas d’appeler. Ça le stresse.

Finalement, il me demande de répondre et de la rassurer. J’ai l’impression d’être dans un mauvais téléfilm. Le mec décroche et me tend le tel et là je hurle : « Appelle les flics !!!! »

Pris de panique, il me donne une gifle monumentale et se barre avec mon portable.

Je me retrouve seul chez moi attaché sur mon lit. Je suis en larmes.

J’arrive à me détacher assez facilement et juste après la police judiciaire arrive chez moi. Ils sont au moins six et ils inspectent tout, y compris mes échanges avec les mecs sur le site de rencontres. C’est une situation très embarrassante même s’ils sont pros et rassurants.

Ils vont rester une heure à m’interroger et inspecter mon appartement. Ils repartent avec la ficelle et les verres dans lesquels mes agresseurs ont bu.

Aurélie et Virginie arrivent aussi. J’ai honte d’être dans cette situation. Honte de mon imprudence. Mais elles ne me jugent pas. On se prend dans les bras. Elles ont eu très peur de me perdre. Ce soir-là, j’ai dormi avec elles.

Extrait du livre T’as pas le sida j’espère?! disponible en version papier et en version numérique.

Crédit photo : Nina Zaghian

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